Elle est snob
- Renée Ledoux
- 12 août 2015
- 4 min de lecture
On m’a souvent dit dans ma vie que j’avais l’air snob. J’ai ce qu’on appelle une bitchy resting face, ce qui veut dire que quand ma face est au neutre, j’ai l’air fru ou distante, bref, on me reproche d’être dure d’approche. Pourtant. Je suis plutôt gênée d’approcher les autres et je ne tente pas de contact cordial sans y être invitée. Je suis comme ça. Ça m’arrive de vouloir être dans ma bulle, comme n’importe qui j’imagine, mais si c’est le cas, je reste chez moi. C’est ma troisième année dans un emploi saisonnier où je travaille indirectement avec une majorité d’hommes. Quelques-uns sont devenus des amis Facebook, certains sont comme des oncles. Ceux qu’on est heureuse de voir parce qu’ils s’intéressent à toi comme un papa. Une des femmes qui y travaille est même devenue une amie. En arrivant le matin, il n’est pas rare que je donne et reçoive câlins et bisous (sur les joues). En général ça se limite à ça. Mais dernièrement…

Ok avant de continuer, laissez-moi vous dire : je ne suis pas prude ou sainte nitouche, mais je ne suis pas un buffet libre service non plus. Donc dernièrement, et quand je dis dernièrement c’est dans les dernières trois semaines, les contacts physiques se sont multipliés. Je me suis dégênée et je me permets de me mêler aux conversations donc les gens doivent voir que finalement je ne mords pas, malgré mes dents (que j’expose avec mes plus beaux sourires). Parfois dans ce travail, les gens sont pressés donc ils ne s’arrêtent pas tous pour dire bonjour ou faire la bise, alors parfois, le matin, quand les gens me voient pour la première fois, il y a des contacts physiques qui doivent servir de « bon matin ! » Du moins, c’est ainsi que j’ai choisi de les interpréter. Une main sur les côtes afin de chatouiller un peu, les deux mains sur les épaules pour un massage agace (ça serre un peu les épaules, juste assez pour te faire baver, puis ça arrête), une main qui glisse dans le bas du dos, puis dernièrement, une nouveauté, le flattage de gras de babye… Juste une mini caresse sur les triceps au repos. Quand j’ai l’appareil photo collé dans le visage, je ne vois pas qui fait ça, je m’arrête alors pour voir qui donc a osé me flatter le mou de bras. « Ah lui ! Ça ne m’étonne pas vraiment, mais ça reste surprenant comme choix de ‘Bon matin’… » Dans la même journée, un collègue avec qui je parle rarement (voir jamais ou preeeesque) me fait un « Pillsbury ». Oui oui, il me poke le bourrelet. Ma face devait être priceless. Si vous avez lu le texte précédent, vous savez donc que je suis à l’aise dans mon corps alors ce qui m’a décontenancé n’est pas qu’on touche à mon gras, mais qu’on me touche à un endroit qui est assez intime selon moi. Le ventre, pas le bras. Je n’en fais pas de cas, parce que je n’ai pas vu ça comme du harcèlement, ni une avance, mais je trouve tout de même surprenant qu’une personne avec qui je ne suis pas intime se permette un contact de cette nature. Je ne peux imaginer ce qu’une personne qui est mal dans sa peau pourrait ressentir à de tels contacts. Violation de leur intimité ? Pourquoi les gens se permettent-ils ainsi de toucher les gens sans un commun accord ? Dans la même lignée, je me suis fait lécher dans le cou puis on m’a donné des bisous dans l’oreille. Ça ne vient pas tout de la même personne. Je n’ai pourtant pas l’air d’une poupée, encore moins d’un bébé qu’on veut cajoler de façon incontrôlable… Oui ? Ceux avec qui je travaille qui s’adonneront à lire ce texte ne sauront pas de qui il s’agit, ce n’est pas là l’important. Mais ils se reconnaitront sans doute. Les contacts humains ça fait du bien, un câlin, une tape sur l’épaule, une poignée de main en mettant l’autre main sur l’épaule (pour les hommes du moins), faire la bise… À la limite, ces contacts font en sorte que je sens que je suis acceptée dans la gang, mais au-delà de ces démonstrations de « base » ça reste à mes yeux, une façon étrange de démontrer à une collègue qu’elle est appréciée. Et si on échangeait les rôles ? À ma connaissance, tous les hommes dont il est question ici sont dans des relations de couple. Encore là, attention, je n’ai pas senti qu’ils me faisaient des avances, pas du tout, mais moi je suis célibataire. Je pourrais bien mal interpréter une série de bisous dans l’oreille ou une main dans le bas du dos, même un « Pillsbury » !! Mais si c’était moi, la célibataire qui se permettait de toucher à ces hommes ainsi. Trouveraient-ils que je m’en permets trop ? Que je flirt ? Que ce n’est pas bienvenu comme contact ? Bizarre ? Aguichant ? Déplacé ? Désagréable ? Si c’est un homme célibataire et une femme en couple alors ? Est-ce différent si ça vient d’un homme ou d’une femme ? Je crois qu’en leur demandant leurs intentions, certains diraient que c’était spontané, non réfléchi, une impulsion soudaine. Ce n’est surtout pas méchant. Sachez, messieurs, que tout contact jugé inapproprié sera aussitôt réprimandé. Demandez à ce copain de classe au primaire que j’ai pourchassé avec une branche de rhubarbe parce qu’il m’avait pincé les fesses. Et j’étais folle de lui ! Le spontané c’est bien avec vos conjoints (même très apprécié en général), mais un peu moins avec des collègues de travail. Et pour ceux que ça intéresseraient, je vais toujours accueillir bises et câlins avec grand plaisir! Images et textes © Renée Ledoux Photographie
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